Dans cet article je vous explique comment gravir le volcan Tacaná, du haut de ses 4060 mètres d’altitude, sans guide et avec un budget minimum. Il faut idéalement prévoir 2 ou 3 jours de trek en fonction de la saison pour effectuer l’ascension et la descente.
Infos générales
Le volcan Tacaná est situé à la frontière entre l’État du Chiapas au Mexique et le département de San Marcos au Guatemala (il constitue en fait la frontière naturelle). Il n’y a aucune preuve d’éruptions magmatiques depuis très longtemps mais le volcan présente de brèves périodes de faible activité avec des fumerolles, la dernière datant de 1986. Il a été désigné réserve de biosphère par l’UNESCO en 2006. Il a la particularité d’avoir ses pentes couvertes d’une forêt luxuriante et de conserver de la végétation quasiment jusqu’au sommet. C’est un volcan qui est assez peu connu par les voyageurs internationaux mais son ascension est prisée par les Mexicains et Guatémaltèques pendant la saison sèche (surtout au mois de décembre). Nous avons fait l’ascension en octobre pendant la saison pluvieuse, ce qui est plutôt déconseillé par les locaux, mais nous ne regrettons pas (au contraire) car la végétation était magnifique et nous étions entièrement seuls sur les chemins de randonnée ainsi qu’au sommet…ceci a rendu le trek encore plus exceptionnel!
Il y a différents accès pour les visiteurs désirant gravir le Tacaná : un du côté guatémaltèque (sur lequel nous avons peu d’infos) et deux du côté du Mexique (ceux que je vais décrire). Les accès au Mexique ont été décrits comme parmi les randonnées les plus intéressantes d’Amérique centrale, empruntant des sentiers à travers des forêts tropicales luxuriantes, des petits villages d’altitude avec de l’agriculture de subsistance, d’anciennes coulées de lave et des forêts tempérées rocailleuses avant d’arriver au cratère et au point culminant (pic, à 30 min du cratère) qui offrent des vues panoramiques. Plusieurs volcans majeurs d’Amérique centrale sont visibles depuis le sommet, notamment le Tajumulco qui est aussi visible tout au long de l’ascension.
Du côté mexicain, l’ascension fait environ 8 et 10 km respectivement en fonction du sentier que vous empruntez avec environ 2000m de dénivelé positif (départ à environ 2000m d’altitude). La distance ne paraît pas très importante mais ne négligez pas le dénivelé qui est très important (particulièrement les 500 derniers mètres avant le cratère qui sont presque à pic) et le terrain est assez technique tout de même (rocailleux et parfois glissant si humide). L’ascension totale jusqu’au pic prend normalement entre 6 et 10 heures en fonction de votre forme physique et des pauses que vous prenez (la descente est plus rapide). La randonnée est qualifiée de difficulté moyenne à difficile en fonction de votre condition physique. Par exemple, nous avons trouvé l’ascension du Tacaná un peu plus difficile que l’ascension du très connu volcan Acatenango au Guatemala, surtout en raison du terrain plus technique.
Où loger avant et après le trek?
Il est conseillé de loger à Unión Juárez avant l’ascension afin d’être au plus près des sentiers du volcan. Il y a de nombreux hôtels mais les prix sont élevés en saison sèche pour un budget backpacker (du moins ceux qu’on a trouvé sur internet). En saison humide, il y a moyen de bien négocier les prix. Nous avons eu une chambre dans un bel hôtel pour 500 pesos/nuit (850 pesos/nuit en saison sèche). Sur place, il est peut-être possible de trouver des logements moins chers en parcourant les rues et en demandant aux locaux.
Les sentiers et comment s’y rendre
Il y a 2 sentiers du côté mexicain pour aller jusqu’au sommet du volcan (voir carte ci-dessous):
– le premier sentier démarre à Talquián (10 km à parcourir jusqu’au sommet). Le sentier longe la frontière avec le Guatemala (il passe en réalité de part et d’autre de la frontière). L’ascension est moins abrupte sur ce sentier (un peu plus facile) et le début du sentier est plus facilement accessible en transports en commun depuis Unión Juárez. C’est le sentier le plus emprunté. Il y a une communauté avec une maison (Casa Yolanda) après 2-3h de marche. Il est possible d’y manger, d’y dormir (dans une cabane) et d’y louer des tentes. Ce sentier est privilégié pour ceux qui comptent dormir en tente car il n’y a pas de cabane à proximité du sommet et il y a des endroits pour camper, notamment le « Plan de Las Ardillas » situé à environ 2h de marche avant le cratère. En saison sèche quand il y a beaucoup de randonneurs, il y a plusieurs points de ravitaillement le long du sentier ou des gens vendent de l’eau et de la nourriture/des snacks.
– le deuxième sentier démarre à Chiquihuites (8km à parcourir jusqu’au sommet). C’est le sentier que nous avons emprunté. L’ascension est plus abrupte et le début du sentier est plus difficilement accessible, surtout en saison humide où il y a très peu de transports de Unión Juarez à Chiquihuites. Il faut en effet payer un pick-up (camioneta) privé pour faire la route car les colectivos et taxis ne vont pas jusque là (ils s’arrêtent à Talquián) à cause de la route qui est trop mauvaise. On nous a annoncé des prix de 700 pesos (d’autres 300 pesos?) pour le trajet Unión Juarez-Chiquihuites en pick-up (30 min). En saison humide si vous êtes seuls (ce qui sera probablement le cas) vous devrez payer le prix complet mais en saison sèche vous pourrez très probablement partager le pick-up et le prix avec d’autres personnes et ainsi diviser le prix par 10 si le pick-up est complet. Une autre option est de faire la route à pied (6 km en montée, comptez au moins 2-3h) ou trouver quelqu’un qui passe par là et accepte gentiment de vous emmener (si vous partez tôt le matin ça risque d’être compliqué). La route Chiquihuites-Talquián est plus facile lors de la descente et est parcourue assez rapidement donc il n’est selon nous pas nécessaire de payer un pick-up pour le retour si vous n’êtes pas trop fatigués (vous pouvez prendre un colectivo à Talquián pour aller jusqu’à Unión Juárez). Mais l’avantage de ce sentier est qu’il est en général moins fréquenté et il y a différentes communautés qui habitent tout le long et où vous pouvez manger et passer la nuit dans une cabane en bois. Les communautés sont indiquées sur la carte (Linda Vista, Papales, Don Francisco). Lors de l’ascension vous verrez un premier panneau en bois mentionnant la communauté de Flores mais il n’y a pas de cabane. En octobre, nous étions les seuls randonneurs à dormir auprès des communautés mais en pleine saison en décembre il peut y avoir 50 personnes par jour qui dorment dans une même cabane! Il y a peu d’endroits pour planter sa tente sur ce sentier (les seuls endroits avec quelques petites places sont une aire de repos avec vue et la Cueva del Oso un peu plus haut, voir carte). Le début du sentier commence dans le village, faites attention aux chiens surtout si vous démarrez tôt et qu’il fait encore sombre.
Logistique (en saison sèche vs. Saison humide)
saison sèche
En saison sèche (novembre à avril), l’ascension et la descente se font en général sur 2 jours. Dormir en tente est préférable si vous voulez éviter les cabanes surpeuplées et si ce n’est pas un problème pour vous de porter votre matériel de camping. Le sentier qui démarre à Talquián est privilégié car il y a plus de possibilités pour planter sa tente. Il est conseillé de faire la première partie de l’ascension le premier jour et arriver avant le soir au Plan de Las Ardillas (situé environ 2h avant le caractère) pour y planter sa tente et dormir. Si vous préférez dormir dans une cabane (par ex pour ne pas devoir porter votre matériel de camping), empruntez le sentier de Chiquihuites et arrêtez-vous pour la nuit de préférence à la cabane de Don Francisco (dernière cabane, à environ 3000m d’altitude et 3h du cratère). Par contre en saison sèche les cabanes peuvent être surpeuplées (tout le monde dort dans une même grande cabane sans séparations). Il est préférable de partir assez tôt le matin pour avoir le temps de monter à son rythme. Ensuite le deuxième jour il est d’usage de faire la seconde partie de l’ascension (de nuit si vous voulez arriver au lever du soleil mais ce n’est pas une nécessité car la vue est souvent dégagée une bonne partie de la journée) et faire ensuite toute la descente le même jour.
Saison humide
En saison humide (mai à octobre), nous conseillons de faire l’ascension et la descente sur 3 jours comme nous avons fait car on ne sait marcher que le matin en raison des pluies diluviennes l’après-midi. Les pluies commencent en général vers 13h et continuent jusqu’au milieu de la nuit, c’est en général très régulier et il pleut chaque jour, mais les matinées sont souvent sèches et la vue est dégagée au lever du soleil (puis se bouche progressivement). L’idéal est d’emprunter le sentier qui démarre de Chiquihuites afin de dormir dans les cabanes des communautés et non en tente (avec les pluies torrentielles je déconseille fortement de dormir en tente). Le premier jour, le mieux est de commencer le trek assez tôt (vers 6h ou 7h du matin) et d’aller jusqu’à la dernière cabane (Don Francisco) où vous passerez la nuit. Nous sommes partis à 6h et en prenant notre temps (avec notamment une pause pour manger auprès de la communauté de Linda Vista), nous sommes arrivés à la dernière cabane avant 12h et donc avant les pluies. L’après-midi nous avons eu bien le temps de nous reposer et dormir.
Le lendemain l’idéal est de faire la seconde partie de l’ascension de nuit en démarrant 3 bonnes heures avant le lever du soleil (départ à 3h pour nous en octobre) afin d’arriver au cratère du volcan pour le lever du jour (le pic est plus haut derrière, à 30min de marche du cratère). Cela permet d’avoir la vue la plus dégagée au sommet (les nuages arrivent rapidement et bouchent la vue) et de profiter d’un lever de soleil magnifique.
Le même jour vous pouvez faire toute la descente le matin avant les pluies si vous êtes rapides, ou vous arrêter dans une des cabanes (nous nous sommes arrêtés à Linda Vista, la plus basse) pour vous reposer et dormir et finir la descente le lendemain matin. Nous sommes redescendu jusqu’à Talquián à pied pour prendre un colectivo jusque Unión Juárez afin d’éviter de prendre un transport privé (coûteux) à Chiquihuites.
Budget
Si vous faites le trek en toute autonomie avec votre propre matériel et nourriturre, vous aurez un budget minimum (transport jusqu’au début du sentier et éventuellement le prix d’entrée).
Si vous dormez et/ou mangez auprès des communautés du volcan, il faudra comptez une petite somme en plus mais les prix sont tout à fait abordables.
Le transport de Unión Juárez à Talquián en colectivo coûte environ 10 pesos mexicains/personne. Le transport de Unión Juárez à Chiquihuites est quant à lui plus cher car il faut prendre un pick-up (on nous a indiqué un prix de 700 pesos pour le pick-up entier, mais d’autres ont dit 300 pesos, le coût étant divisé par le nombre de passagers).
L’entrée au volcan est de 35 pesos/personne. Il y a une cabane de paiement et d’enregistrement pour l’ascension au début de chaque sentier. En octobre (saison humide) celle de Chiquihuites était fermée et nous n’avons donc pas dû payer.
Si vous mangez dans les cabanes des communautés du volcan, comptez environ 20 pesos/personne par repas. Les repas que nous avons eu étaient constitués de tortillas et frijoles (haricots rouges), avec des œufs en plus le matin, ainsi que du café (mais très mauvais, une insulte dans un pays producteur de très bon café). Nous avons pu remplir nos gourdes avec de l’eau gratuitement mais c’est de l’eau non purifiée (eau de pluie), qu’il vaut mieux stériliser.
Si vous dormez dans les cabanes des communautés du volcan, il faut compter 25 pesos/personne pour une nuit (cabane commune pour tous les voyageurs, pas de douches). Les habitants peuvent prêter des tentes à installer dans les cabanes pour plus d’intimité, il faut alors compter un supplément. Attention, prenez bien des petites coupures avec vous car deux fois les habitants des communautés ont fait mine de ne pas avoir de change pour que nous payons plus (alors qu’en réalité ils ont bien sûr de la monnaie pour vous rendre). Nous avons été un peu dérangés par ce manque d’honnêteté (nous aurions préféré qu’ils nous indiquent un prix plus cher pour la nuit plutôt que de mentir sur le fait qu’ils n’ont pas de change).
Equipement
Si vous faites l’ascension en toute autonomie, emportez votre matériel de camping, suffisamment d’eau (2L/personne par jour conseillés), de nourriture (privilégiez les aliments bien énergétiques) et des vêtements chauds pour la nuit et le sommet (polaire, veste, gants, bonnet, etc). En saison sèche, il y a des gens qui vendent de l’eau et de la nourriture à plusieurs endroits le long des deux sentiers ainsi qu’au cratère, mais pas en saison humide quand il y a peu de randonneurs.
Si vous dormez dans les cabanes des communautés, prenez votre sac de couchage et un matelas pour le sol. Les habitants peuvent vous prêter un matelas et des couvertures mais il y en a peu (et parfois de mauvaise qualité) donc vous risquez de ne pas en avoir s’il y a du monde. Prenez des vêtements chauds pour la nuit (les cabanes ne sont pas chauffées) ainsi que pour le sommet. Vous pourrez manger et refaire vos réserves d’eau auprès des communautés mais prévoyez un moyen de stériliser votre eau (filtre ou Steripen par exemple).
La température varie fortement entre le début de l’ascension et le sommet, il est donc conseillé de prendre plusieurs couches de vêtements que vous pouvez facilement empiler ou enlever en fonction de la température. Au sommet la température avoisine les zéro degrés le matin et le vent accentue la sensation de froid. N’oubliez pas de bonnes chaussures (de préférence imperméables en saison humide) car le terrain est assez rocailleux.
Si vous faites la dernière partie de l’ascension de nuit pour arriver au sommet, n’oubliez pas d’emporter des lampes de poche ou lampes frontales.
Derniers conseils
N’écoutez pas toujours les « conseils » donnés par les hôtels à Unión Juárez. Les employés de notre hôtel nous avaient vivement conseillé le sentier de Talquián et de louer une tente à la casa Yolanda…mais en saison humide ça aurait été un calvaire (et même sûrement un réel danger) de dormir en en tente, surtout avec les trombes d’eau tropicales et les orages qu’il y a eu les 2 nuits. Nous avons bien fait de ne pas les écouter et d’aller par le sentier de Chiquihuites et dormir auprès des communautés. Renseignez-vous sur les conditions météo de la saison et des prochains jours avant de tenter l’ascension et étudiez la meilleure option pour votre situation.
….bon trek! 😉⛰️
